Association universitaire d'études drômoises
L'AUED est une association reconnue d'utilité publique qui édite Études drômoises, la revue du patrimoine de la Drôme

3 n’Hollandais dans le Diois

par AUED

Par Philippe Haeringer

Études drômoises n° 74 (juin 2018)
pp. 4 à 9

Résumé d’après l’article

Les Néerlandais, dont le roi fut prince d’Orange avant son avènement, sont très familiers du discret Diois.
Comme dans un conte, trois de ces destins inscrits dans le dernier demi-siècle sont liés. Dans une chanson on pourrait dire : « Trois n’Hollandais sont venus à Die. Le premier a appris l’oc, le deuxième a planté du thym, le troisième a couru dans la montagne »… jusqu’au-delà des frontières.
Et c’est d’une ferme abandonnée et retapée que sont parties trois aventures tout à fait singulières, après un petit tronc commun nourri au fromage de chèvre et aux herbes à parfum.

Han avait une passion : tout en poursuivant ses études de Droit, il bricolait les voitures Citroën. Il avait même créé un « club des tractionnistes », sans négliger pour autant les humbles Deux-chevaux.
« Mais, en 1972, nous avons acheté, avec un couple d’amis hollandais, une ferme abandonnée depuis 20 ans à Vachères. Nous l’avons restaurée et nous avons acheté un troupeau de chèvres.

Nous vivions de la vente de picodons et de plantes aromatiques cultivées (thym, hysope, céleri de montagne).
Comme des voisins parlaient “patois”, je fus quasi obligé d’apprendre la langue du pays si je voulais savoir au moins ce qu’ils racontaient entre eux. »
Et voilà comment tout a commencé pour le lexicographe des parlers d’Oc, aujourd’hui reconnu et célébré, qu’est devenu Han Schook.

Han nous a quittés fin 2016. Sous le très vieux chêne où ses cendres furent enfouies, tout près de son cabanon, le cercle de ses amis, une vraie petite foule, démontra non seulement sa cote d’amour mais aussi la vivacité de la foi occitane.
« J’ai eu beaucoup de chance d’avoir rencontré une génération de la campagne qui soit encore de culture occitane. Depuis 1980, j’ai fait le collectage de chansons, de contes, de proverbes et de dits, de traditions, de formulettes, de médecine traditionnelle, bref tout ce que je pouvais récupérer d’un monde en voie de disparition.

On retrouve cet esprit missionnaire chez le deuxième « n’Hollandais ».
Comme Han, Sjoerd Wartena s’est ancré dans la terre, et comme son ami il a très vite communiqué avec les paysans diois.
Pas autour d’une quête linguistique : c’est la passion des plantes aromatiques qui a pris le dessus, mais avec la même conscience d’une urgence, celle de sauver un patrimoine en perdition.
Bientôt fut créée la première exploitation de plantes aromatiques estampillée « bio » du Diois, dont la production partait vers des herboristes, groupes pharmaceutiques, firmes de cosmétiques, secteur agro-alimentaire…

Sjoerd s’est lancé dans un combat pour que les fermes de montagne, et plus généralement les petites fermes, ne disparaissent pas. Combat local d’abord, qui prit peu à peu une dimension nationale. C’est le réseau « Terre de liens », mouvement lancé dans les dernières années 1990 et porté sur les fonts baptismaux en 2003.
Il s’étend aujourd’hui sur presque toutes les régions de France. Depuis 2007, il est doublé d’une entreprise de l’économie sociale et solidaire, la Foncière Terre de liens, 13 500 actionnaires, 65 millions d’euros, 142 fermes acquises, 3300 hectares loués à 376 fermiers.

Ton Vink, le plus urbain des trois amis, est un homme multiple. Tout en apportant (avec son épouse Marijke) sa contribution décisive au projet paysan commun, d’abord au niveau de la modeste ferme du Quint, il fut amené à créer une unité de conditionnement et de commercialisation des plantes séchées produites dans la région. C’est dans le cadre de cette entreprise familiale aujourd’hui prestigieuse, l’Herbier du Diois, désormais sise à Châtillon-en-Diois et dirigée par le fils de Ton, que se transmet une certaine idée heureuse, optimiste, d’une économie fondée sur les ressources de l’arrière-pays drômois, mais aussi sur des échanges planétaires.

Ton Vink est aussi l’homme qui, à la fin des années 80, permit à Die d’accéder à une notoriété internationale dans un autre domaine, également lié au cadre naturel : la course à pied en montagne.
Parcours roi : la montée du col de Rousset, à l’assaut du Vercors (1000 m de dénivelé).
Cette course, lancée dès 1979 par Jean Petrone et Jean-Marc Sourbier, professeurs au lycée de Die, reçoit en 1986 sous l’impulsion de Ton Vink le label envié de « super cime », puis est retenue pour accueillir (en septembre 1989) la 5e coupe du monde de course en montagne, épreuve gagnée par le Colombien Jairo Correa. La coupe du monde, à Die !

Han Shook, Sjoerd Wartena, Ton Vink
Sous le grand chêne
L'art des petits espaces

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