Le patrimoine en pierre sèche est remarquable par la structure harmonieuse qu’il installe dans les paysages de pente. Cette technique d’aménagement s’incarne toujours différemment selon le terroir, respectant et soulignant « l’esprit du lieu ». Elle est liée à l’aménagement des sols avant la mécanisation et ce depuis que l’homme a su empiler des pierres en équilibre pour faire ouvrage. Elle est de tout temps et de partout, c’est un universel mais très fortement marqueur d’identité.
Nous livrons ici nos analyses et réflexions à partir du terroir de Taulignan, elles vaudront pour beaucoup d’autres.
Les cabanes en pierre sèche sont l’emblème de cette technique de construction. Elles sont liées à la société paysanne et à son utilisation optimale et autarcique des ressources micro-locales. Si la pierre est disponible en quantité suffisante, un ouvrage en pierre sèche ne demande que du travail, aucun autre investissement.
Les clapiers peuvent être de simples tas de pierres pour libérer une pâture ou une culture. Ils peuvent aussi être marqueurs de limites. S’ils ont l’aspect de murs, ce n’en sont pas vraiment, la différence réside dans leur usage de simple stockage, ils sont souvent très larges pour bien contenir la totalité des pierrailles et cailloux.
Les murs, très nombreux sur Taulignan, marquent souvent les limites parcellaires. Ils sont de clôture ou de soutènement.
Les murs « paysans ». Issus de « l’auto-construction », ils sont de facture vernaculaire et le savoir-faire pour les réaliser faisait partie des connaissances de base de tous les « paysans ».
En dehors d’être des soutènements, ils participent par leurs qualités drainantes au réseau de gestion de l’écoulement des eaux.
Les murs « maçons ». Ce sont la plupart du temps des murs réalisés lors de commandes publiques ou de gens ayant les moyens. Ce sont généralement des soutènements de route ou de terrains communaux ou collectifs.
Les pierres dressées. Assez particulières au finage taulignanais et environs proches du fait de l’activité de carrières d’extraction, des dalles dressées peuvent être utilisées en dispositif de soutènement ou comme clôture.
Les murs de clôture sont les murs les plus fragiles, la plupart sont en ruine aujourd’hui ou ont été démolis. Ils ont aussi disparu avec les regroupements parcellaires, la mécanisation de l’agriculture, l’élargissement des accès. Ils étaient généralement liés à l’élevage, soit pour contenir les bêtes soit pour en protéger les cultures.
Les ouvrages en pierre sèche dits hydrauliques sont très variés et attestent de la gestion de l’eau au niveau global du finage. Ils forment un réseau qui amène le surplus d’eau en fond de vallon, à la rivière. Aiguiers et citernes, puits, canaux, touvières, fossés en sont des exemples.
En conclusion, ce patrimoine, toujours particulier à chaque terroir, mériterait aujourd’hui, au même titre que le bâti, une protection prenant en compte sa dimension locale notamment lors de la rédaction des règlements communaux.