Avant l’invention des médicaments à base de molécules chimiques, on se soignait surtout par les plantes.
Chaque village, chaque famille, avait ses recettes traditionnelles et ses herbes qui guérissaient tout et qu’on ramassait à la bonne heure et à la bonne lune.
Mais la médecine officielle en faisait aussi grand cas, et il existait toute une filière de récolte : herboristes de terrain, grossistes, fabricants de tisanes miracles, pharmaciens… Ce sont certaines de ces professions dont la plupart ont disparu que nous allons évoquer.
Un de ces cueilleurs de terrain a laissé quelques traces: Aristide Pacon, à Saint-Agnan-en-Vercors, avait derrière lui une longue tradition familiale car ses arrière-grands-parents ramassaient déjà des plantes dans le Vercors.
Il employait à la journée certains de ses clients pour ramasser des plantes ou les conditionner.
On apprend ainsi que « une journée aux feuilles d’ours » (busserole) était payée 2F à un homme, parfois 3, et 1F50 ou 2F à une femme ou à un jeune.
Il ne vendait ses plantes médicinales qu’à des commerçants de l’extérieur : Nîmes, Marseille, Grenoble, Romans…
Le végétal qui vient en tête dans les citations des acheteurs est le lichen, toutes espèces confondues.
Au XVIIe siècle, ce lichen était réputé dans toute l’Europe comme laxatif. Bouilli dans du lait, il combattait aussi la toux, et certains médecins le prescrivaient au début du XIXe siècle contre les congestions pulmonaires, grâce à sa teneur en mucilages. « C’était très mauvais à boire! »
Après les lichens, la plante la plus ramassée par notre cueilleur était la Busserole ou Raisin d’ours. Aristide Pacon et ses clients l’appelaient « uva-ursi » ou « feuilles d’ours », car seule la feuille les intéressait.
Elle est astringente, antiseptique et diurétique, et était utilisée dans toutes les maladies des voies urinaires. La maison Causse Soubeyrand, à Nîmes, en commandait par tonnes, en 1890, au prix de 24 à 27 F le quintal.
Au troisième rang vient la grande Gentiane jaune (Gentiana lutea) abondante dans les alpages où elle développe ses tiges d’un bon mètre garnies de feuilles opposées en corbeilles pleines de petites fleurs jaunes. Ses racines contiennent un tonique amer, stimulant le foie et la vésicule biliaire. Mais son usage le plus populaire est la fabrication d’apéritifs.
Ensuite viennent le sureau, le tilleul, la fougère mâle, la saponaire…
Les herbes ne sont pas les mêmes, mais l’art de se soigner par les plantes n’a jamais disparu, et il est même en plein renouveau.