par Michel Wullschleger et Raymond Holyst
Études drômoises n° 56 (décembre 2013)
pp. 18 à 24
Résumé d’après l’article
Le quartier du Saut de la Truite, célèbre par son phénomène de « cascade renversée » les jours de violente bise, appartient en fait à la commune d’Omblèze.
On a un peu oublié l’importance du chemin de Bouvante à Omblèze par le saut de la Truite. Longtemps il n’y en eut pas d’autre. Découvert par Michel Barraquand, un document de 1740 évoque ce chemin à propos de la coupe des bois du nord-est d’Ambel, vendue conjointement par le prieur claustral de Léoncel, Pierre Périer, et le seigneur de Saint Nazaire, duc de Tallard.
Le parcours de Bouvante à Ambel fut ensuite aménagé au profit des véhicules attelés par le percement de la falaise.
Le quartier du Saut de la Truite a joué un rôle essentiel dans l’exploitation traditionnelle des bois. Entre 1673 et 1714, les chartreux du Val Sainte-Marie de Bouvante s’étant lancés dans une expérience métallurgiste, avaient besoin de charbon de bois. Ils faisaient, au grand dam des cisterciens de Léoncel, couper et charbonner des hêtres sur le plateau d’Ambel par des villageois.
Ont-ils été à l’origine de l’installation de la « machine » située en bord de falaise et signalée sur le plan de la partie nord-ouest du plateau d’Ambel ? On utilisait ce type de machines pour faire franchir plus aisément et plus rapidement l’obstacle des falaises à des matériaux légers et notamment au charbon de bois.
Au Saut de la Truite, le visiteur découvre l’étonnant mur de pierres sèches étiré depuis le haut de la cascade, vers 1070 mètres d’altitude, jusqu’au pas de l’Aubasse vers lequel il s’abaisse un peu après avoir atteint la cote 1221.
Auguste Gey, le fermier, souhaitait l’extension des surfaces en herbes et en culture. Un jour 7 bœufs aventurés sur des herbages très pentus en bord de falaises, avaient fait une chute mortelle.
Il décida alors, dans un souci de gestion moderne et durable, de construire un mur pour protéger ses bêtes des abîmes du saut de la Truite. Cette décision donna lieu à de multiples procès avec les propriétaires, les Labretonnière, pour des raisons complexes.
Auguste Gey fut remplacé par un nommé Feugier, auquel succédèrent les Barraquand, alors que s’ouvrait une période de mutation, l’élevage ayant tendance à prendre le pas sur l’exploitation du bois.
Profitant de la situation du Saut de la Truite en face des Roissards, hameau de Bouvante-le-Haut, et en dépit d’un dénivelé de 500 mètres et d’une distance de deux kilomètres à vol d’oiseau, Nicodème Erlich, nouveau propriétaire, qui souhaitait conforter l’exportation hors du plateau des richesses naturelles (bois et fourrage) entreprit d’équiper le Saut de la Truite d’un système de transport par câble. Un peu plus tard, un gros câble forestier, capable de porter des charges en bois très lourdes, comme des grumes de hêtres de 10 mètres de long et de plusieurs centaines de kilos.
Le passé récent du plateau est dominé par l’acquisition en 1954 du domaine d’Ambel par le Conseil général de la Drôme qui a entrepris de faire d’Ambel un Espace Naturel Sensible conciliant la protection d’une flore et d’une faune riches et originales.