Association universitaire d'études drômoises
L'AUED est une association reconnue d'utilité publique qui édite Études drômoises, la revue du patrimoine de la Drôme

Journal d’une directrice d’école en 1914

par AUED

Par Madame Roure

Études drômoises n° 56 (décembre 2013)
pp. 3 à 7

Résumé d’après l’article

Mademoiselle Roure, en 1914, dirigeait l’école de filles, rue Amblard à Valence. Nous donnons ici des extraits de son Journal.

28 juillet. …La concierge introduit 5 officiers dans l’école, puis dans mon cabinet. Que me veut-on ? Il est à peine 7 h du matin… « Madame nous venons vous prier de nous montrer votre école pour le cas de mobilisation ». C’est un capitaine du 5 e régiment d’artillerie qui paraît être le chef… J’admire la netteté de son coup d’œil « Messieurs, avez-vous donc quelques nouvelles plus graves ?— Oh non, Madame. Espérons que c’est une simple mesure de précaution »…

Dimanche 2 août. Les mobilisés partent. Les mères se désolent, mais les femmes sont plus courageuses. Quant aux hommes, ils sont admirables… Quel est donc le souffle qui a passé sur notre France ? Hier encore il y avait toutes sortes d’opinions politiques et religieuses, aujourd’hui il n’y a que des Français.

4 août. À 5 heures du matin je suis dans la rue… Un officier passe ventre à terre et me crie « Ça y est ! La guerre ! »… La mobilisation se fait dans le plus grand calme. Les trains de militaires passent, pavoisés de verdure.

2 août. Communiqués du Maire, du Ministre de l’Instruction Publique « Les instituteurs non appelés sous les drapeaux resteront à leur poste jusqu’à la fin de la crise… Ils donneront l’exemple du sang froid et du zèle patriotique ».

10 août. Il faut maintenant préparer la maison pour les victimes de la guerre… Il arrive 1.800 femmes et enfants de la frontière. Je suis allée voir les réfugiés alsaciens à l’école de la rue des Vieillards. Des femmes parlent à peine le français. L’une a deux bébés de 1 et 3 ans.

19 août. En 70, ma mère faisait les lettres de tout le village, 44 ans après je la remplace et fais les lettres de mon quartier… En allant voir une maman tout à l’heure, j’apprends qu’elle vient de mettre au monde son cinquième enfant. Le père est à la guerre, la misère au foyer.

23 août. Le premier train de blessés allemands est arrivé aujourd’hui.

6 septembre. Tous les jours de nombreux blessés arrivent en gare. Hier matin, il y en avait 450 ! Quel trottoir à la gare ! Une centaine de civières par terre… C’est l’infanterie surtout qui est atteinte…

17 septembre. Les combats qui se livrent ces jours-ci sur la Marne, l’Aisne et l’Oise ont été meurtriers et terribles… Il y a à Valence 6 grands hôpitaux militaires ouverts. La ville en installe deux autres, la loge maçonnique un troisième.

18 décembre. Nos instituteurs savent écrire et mourir. On a officiellement annoncé pour la Drôme une dizaine d’instituteurs tués.

Là s’arrête le Journal. Suivent quelques pages blanches et des restes de pages dont on ne sait si elles ont été coupées.

Départ de troupe depuis la rue Faventines
Au quartier Guimandet, à l'est de Valence

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