Association universitaire d'études drômoises
L'AUED est une association reconnue d'utilité publique qui édite Études drômoises, la revue du patrimoine de la Drôme

J’avais 7 ans à Portes en 1944

par AUED

par Francis Barbe

Études drômoises n° 32 (décembre 2007)
pp. 31 à 35

Résumé d’après l’article

Nous sommes arrivés à Portes-lès-Valence la première semaine de mai 1944.

Mon père y avait été muté, bien qu’ayant fait une demande pour le Teil, en Ardèche. Dès le soir du 9 mai, la famille était installée dans une maison charmante, mais jouxtant la gare de triage. Et le soir même, alors que tout le monde dormait à poings fermés, la sirène annonciatrice d’un bombardement retentit, nous précipitant sur le chemin des « Iles » où nous retrouvâmes tout un groupe. Un seul avion survola, cette nuit-là, Portes, causant la mort de 6 personnes.

Ce premier bombardement nous poussa à nous installer plus loin des cibles ferroviaires, à Montéléger.

Mais le cadre paisible de la maison n’empêchait pas les horreurs de la guerre, et, ce soir du 8 juillet 1944, mon père et son voisin tardèrent à rentrer ; ce n’est qu’après minuit qu’ils arrivèrent, bouleversés, ne pouvant manger. Ils venaient d’assister au massacre de 30 otages, amenés du fort de Montluc et exécutés pour venger la mort de 10 Allemands dans le sabotage des bâtiments administratifs du dépôt.

Quelque temps plus tard, c’était mon anniversaire et nous étions calfeutrés dans la maison à cause du couvre-feu quand mon oreille sensible d’enfant me fit dire : j’entends un avion. D’abord incrédule la maisonnée finit par se précipiter dehors pour assister au « spectacle » des bombes éclairantes qui ont sans doute permis le bombardement nocturne du terrain d’aviation de la Trésorerie.

Ce n’était qu’un début : le 2 août, rentrant de Portes à 4 heures du matin après leur travail, ils assistèrent au pilonnage de la gare par une armada de 150 forteresses volantes durant plus d’une demi-heure, pilonnage qui se répéta 4 jours plus tard avec cette fois 300 avions. Ces événements incitèrent mes parents à s’éloigner encore de la gare et nous nous retrouvâmes au quartier Rigauman. Une visite faite à notre ancienne demeure nous prouva le bien fondé de notre départ : elle était démolie !

Le mois d’août 1944 sera marqué par une suite ininterrompue d’événements guerriers, tragiques et destructeurs : exécutions d’otages, bombardements, combats aériens, accrochages avec les maquisards, contrôles inopinés des Allemands et surtout le grondement et l’agitation de « la bataille de Montélimar ».

Mon père, qui ne travaillait plus, la gare étant en ruines, restait avec nous, mais l’inquiétude était permanente tant les troupes allemandes acculées se montraient féroces.

L’arrivée des tanks américains restera dans ma mémoire, marquée par la distribution de chocolat et de chewing-gum. Mon père a participé à la recherche et l’arrestation de soldats allemands désirant se rendre, de préférence à des cheminots plutôt qu’à des maquisards…

Puis ce fut la rentrée des classes, d’abord à Montéléger, puis à Portes où nous étions revenus, pour enfin nous retrouver au Teil, car la demande de mutation de mon père avait fini par être acceptée…

Une vie nouvelle commençait pour moi.

Le petit mazet de la Gamelle
Georges Barbe
Au Teil en 45-46 Georges Barbe à l'extrême gauche
Une maison bombardée à Portes dans l'actuelle rue Gabriel Péri

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