Isabeau Vincent, « la bergère de Crest », fait partie du groupe très restreint des héroïnes protestantes, bien qu’un certain nombre de protestants émettent, dès le XVIIe siècle des doutes…
Née vers 1672, à Saoû, dans une vieille famille huguenote, elle perd sa mère à dix ans et se trouve placée chez l’un de ses oncles.
Le 3 février 1688, Isabeau se met soudain à parler et à crier pendant son sommeil et les efforts de sa tante pour la réveiller sont vains : « on la tire, on la pousse, on l’appelle, on la pique jusqu’au sang, on la pince, on la brûle, rien ne la réveille » écrit un témoin. De sa bouche jaillissent des paroles en bon français, alors qu’elle est illettrée, qui raillent l’église catholique.
Sa réputation dépasse la paroisse de Saoû ; on la promène de villages en hameaux, on parle d’elle jusqu’en Hollande. Les autorités royales finissent par s’émouvoir, Isabeau est arrêtée, longuement questionnée, on lui fait boire de l’eau bénite, sans résultat. Elle est alors conduite à Grenoble et enfermée dans un couvent, mais elle est alors considérée comme la pionnière du mouvement des « petits prophètes » qui va se répandre en Vivarais et dans les Cévennes.
Cette histoire est controversée au sein même de la communauté protestante ; Isabeau est accusée d’avoir été l’une des fondatrices de l’Illuminisme, un vrai danger pour les églises. Les pasteurs des « pays refuges » sont même particulièrement sévères envers les « petits prophètes » qu’ils traitaient avec mépris.
Quant aux historiens catholiques, ils se sont intéressés au prophétisme, qui fit la réputation d’Isabeau. Un étrange personnage, Amos du Ferre, aurait entrepris de « dresser » de jeunes garçons et filles à simuler l’extase et Isabeau aurait été sa meilleure élève. Mais privée de son maître dans son couvent grenoblois, elle serait vite devenue une excellente catholique.
À l’aide, selon certains, de bonnes douches froides et de solides coups de bâton…