Marie-Louise, plus connue sous le diminutif de Mady, était l’aînée des quatre enfants du docteur Lémonon, un médecin très apprécié à Saint-Donat.
Dans cette famille catholique, les garçons fréquentent l’école laïque, mais pour la fille c’est l’école privée du bourg, puis l’institution Sainte-Anne de Valence. Elle épouse un pharmacien, Jean Chancel et après un temps à Avignon, celui-ci ouvre une officine à Saint-Donat dans la maison de son beau-père, rue Pasteur.
Cette famille de notables n’était pourtant engagée dans aucune formation politique et manifestait une grande indépendance qui lui a permis de dénoncer les dangers du nazisme, dont deux des fils avaient pu mesurer l’ascension au cours de séjours en Allemagne.
La pharmacie est vite devenue le lieu où arrivaient les informations et où venaient ceux qui se sentaient menacés, notamment ceux envoyés par le prêtre de Romans Michel Lémonon, frère de Mady. Jean Chancel était devenu un spécialiste de la fabrication de faux papiers, peut-être un millier !
C’est un des « préparateurs » de la pharmacie qui a reconnu le couple Andrieux, alias Louis Aragon et Elsa Triolet, ce qui a permis aux Chancel d’aller vers eux.
C’est dans la maison Chancel que furent rassemblés les aviateurs anglais et leurs passagers, dont Francis Cammaert, alias Roger » du réseau Buckmaster. C’est de là que partaient les expéditions pour aller récupérer le matériel parachuté.
Ces activités intéressent les quelques collaborateurs de la région et plusieurs dénonciations se produisent, dont la troisième entraîne l’expédition allemande du 15 juin 1944 : le village est mis à sac, des arrestations, des exécutions ont lieu, des dizaines de femmes et de jeunes filles sont violées, dont Jeannie, la fille aînée des Chancel, qui en mourra quelques semaines plus tard.
Après la guerre, Jean Chancel est devenu maire, mais il décède en 1952 , Mady doit prendre une gérante, elle passe l’examen de préparatrice. Mais la gérante meurt quelques années plus tard et la pharmacie est vendue en 1967.
Dans des difficultés matérielles importantes, Mady se remet à la peinture avec de jeunes peintres de la région romanaise, L’Atelier 13.
Sa santé se dégrade peu à peu et elle meurt le 20 août 2004.