Donnant la parole – au travers de leurs lettres et cartes au fils, au mari, à l’ami sur le front – aux hommes et femmes de l’arrière, Robert SERRE montre les réactions des familles de poilus à l’entrée en guerre et au départ de l’être cher : leur confiance enthousiaste s’étiole vite. Le contact quasi quotidien par les lettres et les colis, malgré l’accélération de l’acheminement, ne peut suppléer à l’absence et au manque affectif. On suit les efforts pour répondre aux besoins alimentaires et vestimentaires du soldat. On mesure les effets de la censure et de la propagande sur les populations qui n’arrivent pas à imaginer l’enfer des tranchées. L’absence de l’homme se fait durement sentir dans les conditions de vie par la diminution des ressources, l’obligation pour les femmes de se charger des travaux, en particulier dans les fermes, de prendre des responsabilités qui n’étaient pas dans les mœurs, de se débrouiller pour assurer la survie malgré la pénurie et les restrictions. La vie à l’arrière devient triste et monotone, scandée par les deuils et retours d’éclopés, auxquels les œuvres et secours charitables essaient d’apporter un peu de réconfort. La religion redevient un refuge, une manière d’apprivoiser la mort. La foi en la victoire, bien qu’entretenue par les cérémonies patriotiques, ne résiste pas à l’étirement du conflit.
L’article est accompagné d’une abondante iconographie en couleurs, en particulier une sélection de photos et cartes postales d’époque illustrant les différents thèmes de l’étude.
