Par différents auteurs
Études drômoises n° 36 (décembre 2008)
pp. 3 à 14
Résumé d’après les articles
Joseph Servan, un Romanais ministre de Louis XVI par Laurent Jacquot
Le destin de Joseph Servan est un de ces parcours hors du commun dessinés par la Révolution française.
Né en 1741 à Romans, fils d’un receveur des tailles, rien ne le prédestinait à devenir ministre de la guerre en 1792. Bien que reçu au séminaire, il s’engage dans l’armée et poursuit une carrière d’officier. Influencé par la philosophie des Lumières, il rédige un manifeste sur l’organisation de l’armée, Le soldat citoyen, il prend parti contre l’esclavage, envisage l’abolition de la peine de mort.
Mais son avenir militaire piétine et il se range aux idées de la Révolution dès 1790-1791. Soutenu par Brissot, sous la Législative sa carrière repart et, en 1792, il se retrouve maréchal de camp (général de brigade), appelé au Ministère de la guerre. Après un épisode violent en pleine assemblée, où il s’oppose à Dumouriez, Servan se retrouve écarté.
Mais le processus révolutionnaire s’accélère et il retrouve son poste. Il nomme Kellerman à la tête de l’Armée de Metz, qui va, le 20 septembre, remporter la bataille de Valmy.
Mais il est aussi au cœur des rivalités entre Brissotins-Girondins et partisans de Danton-Robespierre, finalement il démissionne. Le 2 juin 1793, les députés girondins sont arrêtés, Servan est emprisonné, destitué de ses grades, ses biens sont confisqués et durant quinze mois il attend un jugement dans la prison parisienne de l’Abbaye. La chute de Robespierre lui permet d’être réhabilité et sa carrière militaire reprend, au gré de ses divers ralliements, jusqu’en 1807 où il prend sa retraite sous Bonaparte.
Difficile d’affirmer que Servan a été un « grand » ministre de la guerre, pas plus d’ailleurs qu’un « grand » général. C’était surtout un honnête homme dont le manque de caractère allait de pair avec ses qualités humanistes refusant les extrémismes, les injustices et qu’on pourrait peut-être décrire comme un républicain monarchiste ?
Joseph Payan par C. et M. Seyve
Né en 1759 à Saint-Paul-Trois-Châteaux dans une famille d’avocats, son ascension est rapide. Conseiller à la Chambre des comptes à Grenoble, maire de Saint-Paul, puis procureur général syndic de la Drôme, il se retrouve parisien, à l’Instruction publique dès 1794.
La question de l’école passionne et les débats ayant accompagné le décret, voté par la Convention en 1793, instituant des écoles primaires d’État, est connu de Payan à son arrivée au ministère. Aidé de ses deux principaux collaborateurs, Jullien et Fourcade, il se met au travail.
Et la création des premières écoles primaires décentralisées, obligatoires, gratuites pose des tonnes de problèmes plus épineux les uns que les autres ! Il faut des locaux, du matériel, des enseignants et en ces périodes de guerre et de violents conflits intérieurs, comment faire appliquer ces décisions ?
La musique, l’instruction civique, le nouveau système de poids et mesures, la poésie, la recherche… tout est abordé et certaines idées déboucheront un peu plus tard sur la création, sous la Révolution, de deux grandes écoles : l’ École polytechnique et l’École normale.
Payan apparaît incontestablement comme un des grands acteurs de son époque, au sommet de la Convention montagnarde.
Notable avant toute chose, il termine sa vie en 1849, à 89 ans, comme maire d’Alixan sous le règne de Louis-Philippe !
Jean-Pierre Montalivet par J.-C. Banc
Jean-Pierre Bachasson de Montalivet, fils d’un maréchal de camp, naît à Neukirch près de Sarreguemines en 1766. En 1779, à la mort de son père, sa mère et lui viennent s’installer à Valence. En août 1785 il est reçu avocat au barreau de Grenoble puis est nommé conseiller au Parlement du Dauphiné. À Valence, il rencontre souvent Bonaparte.
La période qui suit, très troublée, le voit occuper successivement plusieurs postes importants, jusqu’à son mariage, en 1797, avec sa cousine Adélaïde de Saint-Germain, fille d’un riche fermier général.
Après Brumaire, il rallie tout naturellement Bonaparte, occupe plusieurs postes de préfet et en 1805, entre au Conseil d’État, devient directeur général des Ponts et Chaussées puis finalement ministre de l’Intérieur en 1808, s’attirant par là la jalousie de Fouché.
Montalivet croule sous le travail, malgré ses qualités d’organisation, mais cela ne l’empêche pas de s’occuper aussi de la Drôme où, par exemple il lance la construction de digues en maçonnerie pour protéger Valence des crues du Rhône. Installé au cœur du pouvoir, Montalivet saura toujours réserver bon accueil aux Drômois venus le solliciter.
Durant toute cette période, il est l’ordonnateur de grands travaux d’embellissement de Paris voulus par Bonaparte.
À la fin de l’Empire, il se retire dans son hôtel de l’île Saint-Louis, puis sous la seconde Restauration dans ses terres du Berry. Malade, triste et las, il reprend néanmoins du service lorsque Louis XVIII lui restitue son titre de Pair de France.
Il décède en 1823 dans le Cher, et dès lors de multiples hommages lui sont rendus, non seulement par les administrations locales et nationales qui donnent son nom à toutes sortes d’édifices, mais encore par Bonaparte lui-même, pourtant généralement avare de compliments.